Il y a 4 ou 5 ans, je me promenais à la foire aux manèges de Dunkerque pendant les fêtes de Noël. Et là, je tombe sur un manège à poneys. C’est la 1ère fois de ma vie que j’en voyais un. Je suis restée complètement tétanisée devant ce spectacle lamentable. Il faisait glacial ce jour-là et je ne pouvais détacher mon regard de ces petits poneys à l’air misérable et au regard si triste. C’était un manège de petite taille et dès qu’il se remettait en route, les pauvres bêtes repartaient au pas pour parcourir cet absurde petit cercle à l’infini. Alors bien sûr, quand arrive une avancée significative en France contre la maltraitance animale, je savoure pleinement. J’ai tout à fait conscience que la route est encore bien longue mais il est important aussi de célébrer chaque progrès.
Ça n’évoluait pourtant pas dans le bon sens. Car si à l’assemblée, les députés avaient largement voté en faveur d’un large projet de loi sur la maltraitance animale, les sénateurs eux, n’en avaient retenu surtout qu’une partie. Grosse déception de tous les défenseurs des animaux qui ont malgré tout poursuivi leur mobilisation. Or hier, jeudi 22 octobre 2021, coup de théâtre : députés et sénateurs sont enfin tombés d’accord sur une version du projet de loi bien plus engagée.
Je vous propose de revenir sur la chronologie et surtout le contenu de ce projet de loi. Concrètement, quels sont les progrès obtenus pour la défense des animaux ?
Sommaire
- 1 Chronologie d’un projet de loi ambitieux
- 1.1 14 décembre 2020 : dépôt de la proposition de loi à l’Assemblée Nationale
- 1.2 29 janvier 2021 : adoption à l’assemblée nationale
- 1.3 30 septembre 2021 : Adoption par le Sénat MAIS des modifications sont apportées
- 1.4 21 octobre 2021 : Accord entre le Sénat et l’Assemblée Nationale
- 1.5 15 novembre 2021 : Vote à l’Assemblée et au Sénat de la nouvelle loi
- 2 Les principaux acquis contre la maltraitance animale
- 3 Fin des élevages de visons et autres animaux sauvages pour leur fourrure
- 4 Allons plus loin : Referendum pour les animaux
- 5 Quoi de neuf sur la boutique ?
Chronologie d’un projet de loi ambitieux
14 décembre 2020 : dépôt de la proposition de loi à l’Assemblée Nationale
Le projet comporte 4 parties :
- Conditions de détention des animaux domestiques et des équidés. Il y est stipulé entre autre que tout particulier qui acquiert pour la 1ère fois un animal domestique signe un certificat d’engagement et de connaissance des besoins spécifiques de l’espèce. Il est de la responsabilité de celui qui confie l’animal à son adoptant de faire signer ce document.
- Renforcement des sanctions contre la maltraitance animale
- Fin de la captivité d’espèces sauvages utilisées à des fins commerciales. C’est sans doute le point le plus ambitieux. En termes clairs, il s’agit bien sûr d’interdire les animaux dans les cirques mais aussi les spectacles de dauphins et d’orques.
- Fin de l’élevage de visons d’Amérique destinés à la production de fourrure.
29 janvier 2021 : adoption à l’assemblée nationale
Le vote en faveur du projet de loi est franc et massif. 1ère victoire mais ce n’est qu’une étape.
30 septembre 2021 : Adoption par le Sénat MAIS des modifications sont apportées
Le point délicat qui a été rejeté est l’interdiction des animaux dans tous spectacles (cirques, delphinariums). L’article concernant les cétacés a été totalement supprimé. Le sénat a justifié cela par les contraintes économiques des établissements concernés. Or, cette mesure était très attendus par les défenseurs des animaux.
Autre point rejeté : l’interdiction de vente des chats et chiens en animalerie.
Le sénat demande seulement un délai de réflexion de 7 jours avant l’acquisition de tout animal domestique et l’interdiction de mettre en vitrine sur la rue les animaux.
Par contre, les petites annonces sont dans le collimateur du Sénat : il ne sera plus possible de vendre des animaux par cette voie (Le Bon Coin est clairement visé !). Seuls des sites internet agréés offrant toutes les garanties possibles seront maintenus.
21 octobre 2021 : Accord entre le Sénat et l’Assemblée Nationale
Le sénat voulait davantage faire de cette loi un encadrement rigoureux de toute cession d’animal. Et bien sûr, renforcer les sanctions en cas de maltraitance ou manquement. L’Assemblée, elle, avait voté pour un projet ambitieux d’une protection élargie sur plus d’animaux, et pas seulement pour nos animaux domestiques familiers.
C’est ainsi que la dernière version du projet intègre à nouveau l’interdiction des animaux de cirque ainsi que des delphinariums.
Il est encourageant, en particulier dans ce climat politique morose, de constater que des discussions entre différents points de vue soient encore possibles. En l’occurrence, ici, ce sont les animaux qui sont les premiers gagnants.
Autre avancée majeure : cet accord a finalement débouché sur l’interdiction pure et simple de vente de chiens et chats en animalerie, toujours avec l’objectif de décourager les ventes d’animaux sur un coup de tête.
15 novembre 2021 : Vote à l’Assemblée et au Sénat de la nouvelle loi
C’est le texte accepté le 21 octobre qui sera voté. Aucune modification n’y sera plus apportée.
Les principaux acquis contre la maltraitance animale
En animalerie : fin de la vente de chiots et chatons
Soyons honnêtes, il n’est pas facile de résister à des bébés chat ou chien. Ce n’est pas pour rien que nous sommes tous scotchés régulièrement devant des vidéos de chat trop mignonnes. A moins d’être un psychopathe, les bébés animaux réveillent en chacun de nous notre côté protecteur, voire maternel. Alors évidemment, il y a eu pléthore d’animaux vendus à la hâte, sans aucun projet muri. Et puis ensuite, viennent les rendez-vous vétos, les pipis un peu partout, les croquettes un peu trop chères. Et surtout, surtout…l’été arrive comme tous les ans avec ses envies de plage et de soleil. Alors suivent inévitablement les appels désespérés de la SPA qui ne sait plus quoi faire des chiens et chats lâchement abandonnés et qu’on leur ramène chaque jour.
Alors oui, on ne peut que se réjouir de cette décision. D’autant qu’on ne sait jamais très bien d’où ils viennent tous ces animaux.
D’où viennent les chats des animaleries ?
Dans les années 80, dans les cages des animaleries au rayon chat, on trouvait surtout des chatons sans pedigree. Pour se donner bonne conscience, on se disait qu’ils étaient mieux là que dans les rues. Depuis, on s’adresse plutôt à la SPA ou aux associations qui luttent contre la prolifération des chats errants. Et c’est tant mieux. Alors, les chats de race ont remplacé les petits “gouttière”. J’ai pu voir des Maine Coons, des Chartreux, des Bengals, un peu de tout en fait. Mais d’où viennent-ils ? Quand j’étais éleveuse de chartreux, je sélectionnais soigneusement mes adoptants. Déjà que ce n’est pas facile de les voir partir nos boules de poils, alors si en plus, elles partent à l’inconnu, ce n’est pas supportable. Mais alors…mystère…
Bref, c’est doublement une bonne nouvelle. Il faudra quand même attendre 2024 pour sa mise en oeuvre.
Terminé le cirque avec animaux
Cela fait déjà quelques années qu’on en parle. Et face à la montée de la prise de conscience pour le bien-être des animaux, certains cirques ont déjà anticipé la loi. Donc, plus de spectacles de “domptage” de fauves, d’éléphants ou d’ours déguisés. Ce qui signifie naturellement la fin des ménageries de cirque avec leurs cages minuscules.
Cette interdiction des animaux sauvages dans les cirques se fera progressivement : plus de reproduction ou d’acquisition de nouveaux animaux d’ici 2 ans. Mais il faudra attendre 7 ans pour un arrêt définitif de leur exploitation commerciale (fin de tout spectacle et interdiction d’en détenir). C’est le temps estimé nécessaire pour le placement de tous les animaux et la reconversion des cirques concernés.
Idem pour les dauphins et les orques
C’est vrai que c’était sympa de voir les dauphins faire leurs cabrioles au dessus de leur bassin tout bleu. Et puis quand on a vu, par vidéos interposées l’envers du décor, on a sacrément déchanté. Je pense notamment à l’orque Lolita qui vit depuis près de 50 ans dans une pataugeoire de Miami. Elle pèse 3 tonnes.
Et pourtant on le sait depuis longtemps que les cétacés sont exceptionnellement intelligents et sensibles.
Cette décision-là me touche particulièrement car ces animaux me fascinent. Je suis persuadée que si on avait la capacité de communiquer davantage avec eux, nous serions surpris par leur degré d’évolution.
Toujours est-il que la mesure entrera en vigueur en France dans 5 ans.
Fin des élevages de visons et autres animaux sauvages pour leur fourrure
Il était temps ! Et la bonne nouvelle est que cette interdiction sera valable dès que la loi sera votée définitivement.
En France, c’était le vison d’Amérique qui était élevé et beaucoup de fermes d’élevage ont déjà été fermées pour cause de maltraitance. Et fin 2020, c’est un élevage d’Eure-et-Loir qui était sur la sellette car beaucoup d’animaux étaient atteints de la Covid-19.
Allons plus loin : Referendum pour les animaux
Le Referendum pour les animaux est une initiative citoyenne soutenue par des parlementaires qui a pour but d’utiliser le RIP (Referendum d’Initiative Partagée). Cet outil permet de soumettre au referendum une proposition de loi. Pour cela, il faut qu’elle soit soutenue par 185 parlementaires (députés ou sénateurs) et qu’elle obtienne ensuite 4 700 000 signatures.
Parmi leurs 6 propositions, 3 viennent d’être prises en compte avec le nouveau projet de loi.
Mais il en reste 3 à faire accepter :
- Sortie progressive de l’élevage intensif et de l’élevage en cages
- Abolition de la chasse à courre, du déterrage et des chasses dites « traditionnelles »
- Interdiction de l’expérimentation sur les animaux lorsqu’il existe des méthodes alternatives
Pour soutenir dès maintenant leur action, vous pouvez vous rendre sur le site du Referendum pour les animaux et cliquer sur “Je m’engage”.
Parce qu’on en fera jamais assez pour le bien-être et le respect des animaux ♥